jeudi 24 avril 2008

Et quand il n'y a plus rien à dire, il y a toujours quelque chose à dire...


Euh, le titre c'est de moi. Ce qui explique soit que vous le trouviez génial, soit d'une platitude affolante. Bref, passons.

Sans rire, je me suis dit que j'allais blogger un peu, why not? et puis alors, compte tenu de la situation présente (... c'est à dire... compte tenu de la situation présente), j'ai fini par être obligée, devant le curseur clignotant, presque aussi ahuri que moi, de me demander ce que j'allais bien pouvoir baragouiner.

Évidemment, quand on est directement connecté aux foudres de l'inspiration divine, quand les Muses rappliquent dès qu'on leur chante un sonnet pour nous ensevelir de vers nouveaux qui jallissent sous notre plume, quand Homère s'invite joyeusement dans notre tanière poussiéreuse et corrige avec amour nos petites phrases bancales, bref quand tous les secours de la mythologie et de la déesse Poésie sont d'on ne peut plus serviables serviteurs, alors on ne risque pas de plonger dans les abîmes où l'écrivain sans mots tombe parfois.

Pourtant, il paraît que "tout risque à dire sur le déjà dit". Alors c'est quoi, le déjà-dit? C'est "réveil-matin 15 h j'me réveille comme une fleur"... oups, pardon, en fait c'est pas tout à fait ça; pour moi, les premières lueurs du jour qui font frétiller mes rétines s'accompagnent plutôt de hhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhaaaaaaaah bruyants et du clac-clac-clac de mes pieds nus encore engourdis de sommeil sur le carrelage de la salle de bain. Le déjà-dit, c'est aussi (et non, ce n'est pas une pub...) : café, RER, métro, métro, marche... Une pluie de stress continue arrosant tout ça. Puis salle. Table. Entêtes. Sujet. Montre. Stress. Toilettes. Émargement. Chaud. Stress. En retard. 1/4 d'heure. Entêtes. Pagination. Abandon. Rendu de copie. Convocation. Sortie. Soleil (ou pas).
Et rebelotte.

Hum, donc, le déjà-dit, nul n'est besoin d'y revenir. Il est beaucoup trop présent à nos esprits, anyway; je pense que personne n'a besoin de précisions. Alors on cause de quoi?

On parle de tout plein de petits détails et on agrémente. Souvent, je préfère inventer des choses qui n'existent pas; mais ces personnages et ces lieux qui prennent forme dans mes phrases, ils ont la couleur, un peu pâlie, des petits rien de tous les jours.

Ce monsieur barbu, là-bas, accoudé à droite au rebord sale de la fenêtre du train, regardez : c'est le père Noël. Seulement, aujourd'hui, il est incognito. Sa femme l'a foutu dehors parce que quand Noël est passé, monsieur n'a plus rien à faire. Alors il bricole. Il boit aussi. Le garage devient un vrai merdier, alors il se fait virer. Il revient au bout de 3 jours, et tout repart dans des embrassades et des p'tits gâteaux à la cannelle faits maison. Mais en attendant l'inévitable réconciliation, il faut se passer des rennes, du traîneau, tout le tintouin.
D'où le RER.

Si vous écoutez, vous entendrez, outre bien sûr le babillage continu des deux vieilles peaux aux doigts lourds de bagues et aux comptes en banques sûrement replets, le crachotement du train en arrière fond. Ça souffle, ça s'agite, ça tremble, on dirait que ça va lâcher, puis ça repart tranquillement. En fait, ce sont des bébés dragons qui font avancer le gros tas de ferraille dans lequel vous essayez laborieusement d'apprendre encore la foutu formule de l'inégalité de Taylor-Lagrange.
Mais vous ne le savez pas. Parce que peu nombreux sont les gens qui, voyant le RER arriver, se baissent jusqu'à terre pour lui regarder le nombril. En fait, vous êtes tout ignorant du fait qu'en période de croissance post-natale, l'énergie dégagée par un petit énergumène cornu à la peau écailleuse (surtout lorsqu'il commence à cracher du feu) est tellement incontrôlable que les parents se sont résolus à utiliser cette puissance pour le bien commun (hum, "moralism in the name of collective survival"?) de manière à évacuer sans danger pour personne ce qui causerait beaucoup de dégâts sinon. La RATP est contente; ça fait des frais de moteurs en moins. Les dragons idem.
All is allright in the best possible world.

Si vous saviez tout ça, vous ne risqueriez plus de dormir, la bouche ouverte, bavant presque sur vos fiches de maths, quand vous venez le matin.

Évidemment, vous ne me croyez pas. Pourtant cette femme, là-bas, qui traîne un gros panier en raphia, qui semble une bonne mère de famille, une femme d'intérieur lambda, qui sait ce qu'elle ramène chez elle? Et le chaudron, dans la cheminée, vous croyez que c'est pour faire la soupe quand le nouveau gendre, beau costume-belle bagnole-beau salaire, vient déjeuner le dimanche? Bizarre qu'on ne trouve que des racines de chou et des plumes de corbeau à proximité des ustensiles cuivrés.

Même ce soleil, qui vous dore le bout du nez entre deux maxi-prises de tête, il n'est pas vraiment d'ici. Pendant la nuit, il a laissé la lune faire le boulot, il est parti. Où? Où vous voulez. Chez les sirènes; il a rasé le fond sablé de l'océan, se moulant contre les dunes aquatiques, et il a apporté un vrai jour aux poissons qui n'ont jamais que de pâles reflets de la splendeur du soleil quand il est chez nous. C'est élémentaire (mon cher Watson...).

Alors demain, faites-moi plaisir, regardez. Et si vous finissez par voir le petit farfadet qui se balade à côté de vous et qui vous suit comme votre ombre, dites-le moi sans paniquer.

Alors je vous expliquerai qu'on arriverait quand même pas à faire tout ça si chacun de nous n'avait pas son p'tit ange gardien avec lui.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Wahow.

Ca donne envie de regarder sous les RER, d'héberger le père Noël pendant trois jours et de suivre le soleil au bout de la nuit.

Et même bien plus encore.

Et puis l'ange gardien, parfois, c'est juste un sourire et une histoire d'économie d'énergie chez la RATP.

Merci :)

Unknown a dit…

Merci de bouts de rêves... =)