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mercredi 21 juillet 2021

Prisme

 
 
J'avais eu une semaine chargée. Émotions, trop, beaucoup, ou même juste au-dessus du bord, à calmer. Mais dans l'ensemble, on avait fait tenir les digues, et les crins-crins anxieux et glapissements intimes n'avaient pas dépassé les bornes ; je les avais noyés d'un tour de main dans nos sourires complices et la certitude que j'avais de nos connivences. L'ensemble s'était montré étonnamment solide, j'avais goûté à l'apaisement du rythme et du contrôle, entre deux flancs de montagne tranchés par le lac émeraude, sous les averses, en traversant les foules corpulentes de touristes. Un 14 juillet de bruine et d'éclats un peu chiches – les feux divisés sur toute la ville d'Annecy, pour morceler les amas vivants et servir d'anticoagulant au virus. Résultat : des ballets de lumières tronqués par les arbres, tout près, ou bien des arabesques entières, mais diminuées par la distance, et ridiculement petites depuis les rives où nous nous tenions. Mais nous en riions, en maugréant, peu charitables, contre tous – leur bruit, leurs propos, leurs gestes –, à deux contre un monde, peine perdue mais retrouvailles chéries dans le sentiment d'un commun jugement des autres. 

Et puis ce jour-là, sans savoir d'où, un Prisme remonte et s'impose, et je n'y vois plus que par lui, ses verres opaques, jusqu'au strabisme de toute situation. Alors mon ton s'enraye et mes mots deviennent durs, contre toi parce que contre l'image que j'ai de moi avec toi. Au fond de moi, c'est l'accusation qui gonfle contre nos accords réciproques, et la place que je me crois assignée qui me révolte. Victime. Je t'en veux et j'accueille ce ressentiment sans distance. Je l'abreuve. Tu te cabres. Je m'insurge. Tu t'éloignes. Je retiens. Tu forces. Je pleure. Tu te glaces. Je m'enflammes. Tu t'indiffères. Je m'arrache.

Dehors, la nuit du parc à quelque musique tinte chaudement. On me conduit à la table en terrasse, une personne, oui, entrée plat et un verre de Riesling. J'ai caché mon visage un temps sous le masque, ironiquement bienvenu, puis je l'ai tombé. Après tout, quelle importance : tu es à deux pas dans la chambre, mais tu n'es plus là avec moi. Pour quelques heures (jours ?) tu t'es cloîtré, je te connais, et m'insupporte ta coquille déçue, ce retrait violent que tu m'infliges quand tu as mal. Je dois réajuster mon corps et mon cœur dans cet espace d'où tu as fuis, où tu joues la distance. 

Et je m'octroie le droit de t'en vouloir, oscillant entre colère et tristesse quand je sais trop fort aussi que j'y suis pour quelque chose.

vendredi 11 juillet 2014

B-N-F


Deux fois en six jours que j'arrive avant l'ouverture de la BNF... il se passe quelque chose dans ma vie. 
Alors, le casque sur les oreilles, les doigts agités au rythme d'une musique soigneusement accordée à l'humeur boudeuse du jour, je me pose à Exki, je commande un café (qu'il est pas cher quand on le prend avant 11h alors c'est vraiment chouette), et je bouquine ou je pianote, au choix, en attendant que se réveille le monstre-aux-livres, pas loin. Et quand, la gueule bâillante, les griffes détendues, les rayonnages frémissants, l'immense caverne de métal aura vaguement émergée du sommeil des mots, déjà assaillie par les thésards en manque du Rez-de-jardin, alors j'irai m'engouffrer dans ses entrailles, arpenter ses halls immenses, ses volumes effroyables et mégalomanes, j'irai me perdre dans ce palais multidimensionnel !
Et travailler, si le coeur m'en dit. 

Digérée lentement par la bête, je m'absorberai dans un livre, je verrai les heures filer, pâlottes et taquines, sous les baies vitrées crasseuses où s'efface le vert des arbres, devenu opaque et glissant de pluie. 
Une épaisse langueur, nourrie de tapis rouges foulés par d'innombrables pieds, pèsera un peu plus sur mes épaules fatiguées. Le bruit des doigts sur les claviers martèlera mes tempes et se mêlera au bruit des gouttes lâchées du ciel par quelque farceur hydrophile.

Et vous, que ferez-vous aujourd'hui ? 

vendredi 27 mars 2009

Réponse à un acte de pétage de plomb


Pétage de plomb?

Oui, pourquoi pas, ma foi, ça peut se comprendre. C'est on ne peut plus justifié, ou justifiable. Car l'origine même de tout emmerdement, cette énergie haineuse qui déborde, ce "je-n'en-peux-plus", ça nous tord le ventre et nous remue tout l'intérieur - pauvre petite chose, incapable de trouver la sortie.

Alors le pétage de plomb, vous comprenez... : la seule solution pour que ça parte! Il faut que les coutures craquent, qu'on opère à vif, avec une entaille bien nette et sans bavure. Il faut cisailler joyeusement, faire gicler les pensées stagnantes, les obsessions qui sentent le renfermé. L'exhibitionnisme nous sauvera! Il faut tout montrer, tout faire sortir. C'est au dehors que doivent rebondir les tracas qui nous minent. Là il y a plus de place pour jouer, pour renvoyer la balle; au lieu que coincées dans nos têtes lourdes (lourdes...) les chimères sont à l'étroit. Elles se cognent un peu partout, incapable de se dépêtrer l'une de l'autre; ça forme un grand tas de merde (bullshit?) qui nous encombre. Un truc horrible, impossible à déloger de là. Quelque chose à la fois informe, inidentifiable, inavouable (inimaginable)... et pourtant impossible à ignorer. Pas moyen de contourner l'entassement de nos problèmes. On se réfugie dans les parties de notre conscience encore saines et épargnées. Mais le niveau monte...

Alors oui, moi j'approuve. Le pétage de câble. La crise de larmes. La Désillusion, en personne. Le "hurlement primaire". Retrouver l'extrême, l'inapproprié, le politiquement incorrect. Se nourrir du démon de la perversité? Comme quoi nous sommes toutes sur la même longueur d'onde.

Docteur, peut-on opérer?

Salle de réveil. Pour l'instant, j'expérimente la sortie d'anesthésie. Je crains le moment où les choses me redeviendront trop claires pour que je puisse croire aux hallucinations. Dans le flou, tout se perd, tout se retrouve. Il y a toujours moyen de s'appuyer sur un fantôme. Mais assurément les gentils messieurs en blouse ne vont pas tarder. Ils m'emmèneront dans la salle carrée - à moins que ce ne soit rectangle, avec quatre côtés, et quelques-uns en plus. Et là ce sera horrible.

Plus rien à l'intérieur, ça a craqué, tout a fui.
Oui mais dehors? La certitude du vide et de l'indifférence? La belle machinerie huilée du recommencement des jours : la duplication des banalités, à l'échelle éternelle du temps. La routine, quoi.

Et bah... Vautrons-nous dans le Néant!
Jetons-nous à l'eau! Noyons notre mal de crâne! Buvons la tasse... comme du poison dans l'eau!

samedi 31 janvier 2009

The Room



Je reviens, comme toujours, à mes amours passées, à mes idéaux d'un temps, comme s'ils pouvaient n'avoir jamais changé. Je reviens ici, dans cette chambre qui fut si longtemps la mienne (et qui, prétendant l'être toujours, ne peut pourtant se hisser à cette réalité du "chez soi"), et j'y retrouve des espoirs que la vie, vieillissante, aurait dû faire disparaître. Au lieu de cela, impatients, émerveillés, ils viennent me saisir de nouveau. Leurs regards impérieux m'ordonnent de répondre. Qu'as-tu fait depuis tout ce temps? Qui es-tu devenue?

Il m'est impossible de leur répondre. D'ailleurs, les côtoyant de plus près, à mesure qu'ils se pressent autour de moi en filaments échevelés, je m'aperçois qu'ils ont eux aussi subi les affres du temps. Oui, ils me semblaient - quand ils étaient encore loin et lovés dans la poussière des meubles - ils me semblaient si semblables à ces imaginaires que je m'étais forgés il y a quelques années, et que j'avais laissés vaquer, seuls, dans cette chambre, après m'être envolée pour les latitudes parisiennes! Mais je me trompe. Non, ils ne se ressemblent plus. Sous couvert d'une innocence et d'une fraîcheur dont ils cherchent encore à se vanter, leurs faces sont ridées, leurs mots sonnent creux, leurs promesses se sont affaissées. Leurs milliers de petites mains me pointent du doigt, m'accusant presque. Regarde-toi, regarde ce que tu as fait de nous, regarde comme tu nous as tous oubliés...
Mais je pourrais tout aussi bien leur répondre: Regardez comme vous avez changé, vous ne valez plus rien, vous n'êtes plus qu'un souvenir, et l'âge vous défigure, et vous redeviendrez poussières... Poussières d'élucubrations. Et aujourd'hui, vous n'avez plus de consistance.
Alors qu'ils les brandissent, leurs poings menaçants, ce sont des fumées que je ne respire plus. Je n'ai plus besoin d'eux.

Oui, cela est juste, je n'ai plus besoin d'eux. Ils appartiennent à l'imagination d'une fille qui, je crois, n'existe plus vraiment, bien que souvent j'aimerais qu'elle soit encore là. Je n'ai plus besoin d'eux, mais leur absence pure et simple me serait trop lourde à porter. Alors l'espoir, malléable, diffus, planant dans l'air de nos maisons, glissant sur nos peaux, baignant nos réveils et nos couchers, me demande de me saisir de lui pour forger de nouveaux espoirs. Bannir les têtes poussiéreuses de mes anciens fantômes, peupler mon monde d'un autre rayonnement, encore vivant, encore fidèle...
J'ai peine à façonner ces chers visages qui me guideraient vers un désir quelconque. L'avenir me semble brouillé, confus, sans malignité je le vois se dérober à mes regards troubles. Peut-être même que je ne tente pas vraiment d'y discerner quelque chose de formulable. Quoiqu'il en soit c'est un flottement vague qui pour l'instant peuple cette chambre, une vibration opaque qui habille d'inconnu les scènes où mes regards se jettent, cherchant trop à saisir pour percevoir quoi que ce soit.

Et dans l'attente d'un naufrage
Les rêves cherchent à rester

De ce temps qu'il nous faut aider

S'engendre
un âge après un âge

(pix: Room, Idontknowupeople, deviantart)


vendredi 31 octobre 2008

Spirale


Ce n'est pas de la mauvaise volonté, loin de là. Simplement la perte de l'habitude, le réflexe tout comme le besoin qui se délavent. Et ça fait de gros trous d'absence, sur mon blog, où finalement quelque chose se révèle peut-être, dans les silences, dans l'à-côté du papier. Ce qu'il est dense, pourtant!, indescriptible, inenvisageable, ce rythme qui habite mes jours, leur laissant une indolence dont le coeur bat trop vite, désynchronisé...

Les questions viennent moins souvent qu'auparavant agiter mes pensées au-dessus du gouffre de l'avenir, et si j'ai les pieds qui pendent dans le vide, la position me plaît.
Je sens l'équilibre fragile se tisser, progressivement, bâtissant sa structure éphémère entre visages et lieux familiers, aimés, espérés.
Je sens que j'ai besoin de cette perception magnifiquement défigurée pour écrire.
Je sens que tant qu'elle ne sera pas pleinement là, ça pourra attendre.

Attendre... Il y a trop de choses dans ce mot; promesse, crainte, impatience, désillusion. Un sursaut de corps brisé, qui se redresse sous la main rigide du temps, et déploie sa silhouette entière. Comme une liberté qui rechigne et se fait désirer. Ce que j'ai hâte de voir à nouveau! Mais ces choses là ne se décident pas. On se les prend en pleine gueule, un matin de crachin. Dans la succession des parapluies qui tapissent les rues, dans le coup de burin des talons frappant le pavé, dans l'espace qui disparaît entre deux corps, insensiblement, au fil des jours...

Je maîtrise le ralenti du monde, et cherche à oublier.
Pour retrouver.

mardi 21 octobre 2008

Back in town

Finalement, j'attends avec impatience de pouvoir retrouver les latitudes parisiennes. Ici, depuis quelques jours, le temps s'écoule uniformément, à faire les mêmes gestes dans les mêmes pièces, et il pourrait en être de même pendant encore des semaines... Bien obligée.

Mais bon, tout va rentrer dans l'ordre, et je vais enfin (tous!) vous revoir. J'attends vos sourires et vos blagues vaseuses avec impatience...

I must admit I miss you all.

dimanche 5 octobre 2008

"Des riens, ce sont des riens qui sont l'essentiel. Ils finissent par vous perdre." (Crime et châtiment, DOSTOIEVSKI)


On me dit qu'on ne lira pas mon dernier post, ésotérique et surtout long, trop long. Je réponds que cela ne fait rien, que je l'ai lu et relu pour les autres, et que son écriture m'a fait plus de bien que ne vous en fera sa lecture.

Un dimanche, donc, encore un, comme toutes les semaines. Celui-ci s'annonce pluvieux et venteux. Le ciel est gris dehors, vaguement lumineux. On sent bien qu'il y a quelque chose derrière qui veut pousser un grand coup de gueule, mais que ça ne parvient pas à passer. De la frustration des ciels de mauvais temps en milieu tempéré?

Tiens, je me demande s'il ne pleut pas... Retour dans ma banlieue/campagne, sous des auspices indifférents. Ces derniers temps, j'écris un peu partout, sur tout ce qui me passe par la main. Mon agenda, mon cahier, mes feuilles de cours l'ont appris à leurs dépends. Je laisse des phrases esseulées dans tous les coins de ma chambre, sans avoir l'intention de les relire un jour. Un peu égoïste... Finalement je prive de leur raison d'être ces vers, ces ritournelles de mots que je couche sur le papier. Je ne sais même pas si ça me soulage.

D'ailleurs, me soulager de quoi? Il est temps que les cours reprennent, que je cesse d'être "seule" face à moi-même. C'est très dur de vivre avec soi, en permanence. Plus exactement, c'est très dur de ne vivre qu'avec soi. Sans les grésillements bienheureux d'arrière-plan, les cours, le boulot le soir, le stress, l'abrutissement quotidien devant l'écran d'ordinateur. Je suis sûre qu'à force d'être confronté à sa propre compagnie, matin et soir, on finit par développer une hyper-sensibilité très mal placée. Prétentieuse et vaine. Et fatigante.

Je devrais me replonger dans des choses plus constructives. Terminer (ou déjà avancer) Evrasth. Essayer de débloquer la situation (j'ai calé pendant la scène du lever des Soleils). Ça avançait bien pourtant... Dur de se concentrer longtemps sur la même histoire. J'aime les inventer, les ciseler, et les terminer abruptement, sans prendre vraiment la peine de conclure. Essayer de développer une réelle intrigue, voilà l'enjeu de cette année!!

Quoiqu'il en soit je retrouve le plaisir de regarder les gens autour de moi, d'observer la vie à l'état brut fourmiller dans Paris (et ailleurs...), se nourrir des basses réalités de notre quotidien comme de nos rêves les plus fous. A force de s'accrocher à ces visages, ces silhouettes qui évoluent autour de nous, on finit par y voir autre chose. Comme si on touchait à quelque chose de plus grand, de plus rassurant. Une certitude générale, quelque chose d'intangible, peut-être. Attention au syndrome divin, cependant.

Je m'aperçois que j'apprécie de plus en plus les instants de nuit que j'apprends à connaître, autour d'une bière, d'un DVD, ou d'un thé. Il me semble que j'ai écrit quelque part, il y a peu..., oui, c'est ça: "Après une soirée, quand il est tard, plus tard que tard, qu'il est dur d'aller se coucher, d'abandonner la sérénité nocturne où tout devient flottement, suspension! On a l'impression de vivre des moments interdits, des secondes et des heures qui n'existent pas pour les enfants et les couples plongés dans leurs draps. La nuit nous offre cette petite victoire, un moment d'éternité entre le crépuscule et l'aurore, un instant divin où nous nous sentons puissants, prêts à accomplir de grandes choses, à changer le destin du monde d'un claquement de doigts, à le magnifier d'une phrase négligemment jetée sur le papier jaune d'un poète inconnu. (...) Il est des choses qu'on ne peut voir que dans l'obscurité.".

Un peu pompeux peut-être... Enfin, assez propre toutefois à transcrire ce que je crois.
Que faire alors de nos journées? Celle qui vient s'annonce, pour moi, assez morne. Enfin je pense. Non que cela me désespère; j'accueille plutôt cette vérité comme une nécessité (non, je n'ai pas dit "fatalité"...). Bien sûr que j'ai des choses à faire; bien sûr aussi qu'il est très probable que je ne les fasse pas. Pourquoi? Oh, la psychanalyse serait aisée; apathie, désintérêt, narcissisme, état larvaire, rêverie...
Bof, je pense qu'il est plus simple de dire : "Je n'en ai pas envie".

(pix: Rain... rain, by LonelyPierot, deviantart.com)

mercredi 1 octobre 2008

Somnambule


Voilà. Il est minuit vingt-cinq, qu'est-ce que je fous encore à blogger à cette heure?
Comme si c'était simplement une question de timing. Back in room, la journée est finie... Mais pour l'inspiration, pour ce besoin d'écrire qui vous prend, pas d'horaires, pas de contraintes.

Les portes de part et d'autre du couloir rose s'alignent. Vos pas claquent sur le lino. La clé est dans votre main, vous entrez. Vous rentrez, plus exactement. C'est que le "r" a son importance. C'est lui qui signifie le retour, qui signifie que vous retrouvez le lieu qui vous habite plus que vous ne l'habitez.

Dehors, plus grand monde. Certes, les nuits parisiennes sont rarement vides. On y sent toujours ce murmure au bord de la rumeur, ce petit grain de voix prêt à s'élever; même le silence fait du bruit, le soir, à Paris.

L'ordinateur s'allume; les diodes clignotent comme une révélation intermittente. Le flambeau de Saint Pierre, tantôt ardent, tourné vers vous, tantôt caché par l'ombre d'un habitant de là-haut, qui passe devant le feu.

En m'asseyant sur mon lit, en laissant mon corps, mes angoisses et mes espoirs s'éparpiller dans cet espace de 12 mètres carrés (ou presque), je sens quelque chose qui se concentre. Une frustration. Le refus d'une certitude. Il y a ce dédoublement entre ce que je vis et ce que je veux, entre ce qui est et ce que je voudrais qu'il arrive. Mes doigts n'en peuvent plus de se retenir, ils attendent avec une avidité dévorante la fenêtre de texte qui sera leur vomitoire.
Non, ce n'est pas de l'art. Ce n'est pas de la littérature, ni de la composition. Rien qu'un bout de vie qui finit de gigoter là, sur la page virtuelle d'un espace virtuel circonscrit dans un grand tout virtuel.

Dans tout cela, qu'y a-t-il de vrai? Ce que je ne puis m'empêcher de raconter ici, cela même a-t-il quelque réalité? On a l'illusion de tout laisser passer, en vrac: fantasmes, inspiration douteuse, volonté de créer. On se berce avec tendresse de l'idée que , dans ce moment, on dit plus que jamais ce qui imprime sa trace au fond de nous. Comme si l'on pouvait rendre parfaitement la marque que laisse le drap sur notre joue, quand on se lève maladroitement le matin. Mais dès qu'on quitte le lit, le dessin ésotérique de nos songes secrets s'évapore déjà.

J'aurais tout aussi bien pu laisser ma carcasse rouillée dans ce grand mou de vert et bleu, derrière moi. J'aurais pu vous éviter un post qui n'a d'utilité que pour la satisfaction (maigre) et le soulagement qu'il m'apporte. Trouvez-vous impudent et vulgaire de se reposer ainsi sur les autres du repos de son coeur?
Ca ne l'est pas. Puisqu'après tout, personne n'est obligé de publier. De longues années durant, j'ai écrit, écrit, écrit... Sans jamais dire quoi que ce soit à personne.

Après avoir vu un film où les gens de tous âges et toutes orientations sexuelles sont en couple non stop 24h sur 24, on se pose des questions. Hum..., non, ce n'est pas vraiment ça. Non, n'imaginez pas que c'est une énième crise de désespoir quant à une situation sentimentale au point mort depuis... (vous n'aimeriez pas savoir depuis quand). Au contraire, c'est la lâche indifférence qu'on finit par attacher aux choses, et dont on se repaît, car on croit y voir une sorte de sagesse supérieure. N'est-ce pas plutôt le renoncement qu'on aime dans cette posture de faux philosophe?

Une petite déception illumine ma soirée. D'ailleurs, si on y réfléchit bien, c'est elle qui m'amène ici, me poussant fermement dans le dos de ces deux petits poings froids. En fait, c'est moins qu'une déception; plutôt une contrariété. Mais ce sont les petites choses qui bousculent les grandes, rarement l'inverse. Nous trébuchons sans cesse sur les angles mal polis des pavés qui couvrent nos vies; nous ne tombons guère par-dessus la rambarde des ponts. Ce sont ces re-directions permanentes et négligeables qui dictent à notre humeur, à nos envies d'écriture, leur contenu.

Cette nuit, je suis trop fatiguée pour relire ce que j'écris. Et même s'il apparaît, par la suite, que c'est presque totalement illisible, tant pis.
Cela faisait bien longtemps que j'avais aussi peu peiné sur mon clavier.

jeudi 25 septembre 2008

La nuit nous appartient


Quelle journée!

Remplie à ras bords, dégoulinant de minuscules détails d'une précision et d'une ponctualité écoeurante. Au final, rien d'intéressant à en tirer. Pas même trois lignes (pas même une!) qui mériteraient de figurer dans ce post.

Et pourtant, si les sombres héros de l'Antiquité Grecque savaient... Nous avons frôlé l'épopée!
Il y eut ce corridor poussiéreux dont le parquet craquait sous les pas endormis, il y eut cette foule, cette masse humaine qui préside aux grands tournants de l'histoire. Un peu comme les données sociales, économiques et anthropologiques qui posent les bases de la psycho-histoire de Fondation chez Asimov: c'était un mastodonte, un monstre lourd et indomptable, incontournable, inévitable. Les corps des élèves debout, seuls, perdus sous des buissons de photocopies, semblaient faibles et désarmés. Mais ensemble, ces silhouettes trop fines devenaient brutales, se dressant là entre moi et mon inscription pédagogique de fac comme le piège entre le rongeur et le morceau de gruyère. Pas d'autre choix que de rejoindre l'immonde chenille aux segments humains.
C'est l'attente qui commence.

Et cette imperturbable rien-du-tout, cette tension qui empoisonne l'air sans rien constituer de palpable, n'est-ce pas digne des plus grands thrillers? On poireaute, on en a marre, on en a plus-que-marre... et on reste. N'est-il pas héroïque de repousser ainsi les limites du ras-bol? Des alliances se nouent, des sourires s'échangent avec certains des êtres condamnés comme vous à rouler leur carcasse affaiblie vers une destination inconnue (car la ligne zigzagante des têtes s'enfonce vers le lieu de la délivrance sans qu'on puisse en distinguer nettement la fin...).

Les heures défilent, encore, encore (et quand je parle d' "heures" ce n'est pas une façon de parler... j'ai des témoins!). Le plus étonnant est qu'elles s'entourent d'un mystère non conforme aux sécheresses de l'administration. Certes, vous avez coché, sur cette feuille d'un jaune criard, le TD qui vous "intéresse". Certes, vous avez fait un choix, vous avez tranché dans le mou comme on plante un couteau aiguisé dans un gâteau trop peu cuit (pas de remarques ricanantes sur mes exemples culinaires!). Mais toutes vos actions restent nimbées d'une auréole nébuleuse, entre les hautes sphères de la décision et les brumes basses de l'incertitude. Il faut bien avouer que vous avez fini par "mettre au pif".

Et bien, croyez-moi ou non, ce n'est pas si facile. L'esprit humain a énormément de mal à abandonner toute maîtrise sur les choses, à s'en remettre au pur hasard. Il s'agrippe sans cesse aux grilles, cases, questionnaires comme un skieur débutant au téléski dont il vient de tomber; il y cherche des logiques cachées, choisit des numéros de groupe, des plages horaires selon des procédés ésotériques ("oui, tu comprends, mon 2 est le chiffre porte-bonheur...")... Tout pour ne pas se retrouver à conclure, au final, que le résultat aurait été sensiblement le même si les réponses avaient été données par une môme de 5 ans armée d'une boîte de crayons de couleur.

Rude épreuve, donc, que cette matinée! L'après-midi sera sur cette lancée.
Mais les fins d'aprèm' ont des charmes qui se dissimulent d'abord, par pudeur, et se dévoilent au coin des 20h pour nous surprendre agréablement. Les acharnements trop vains de la journée finissent par se résigner; les soirées DVDs chaleureuses, confinées entre rires débiles et questionnements tout aussi stupides (ou comment matter deux films à la fois: celui qui gigote à l'écran de l'ordi, et celui que vous racontent vos camarades de watching...) sont leur défaite. Le beau flottement des 23h, entre sommeil et excitation, se savoure délicieusement autour de gâteaux japonais. On gobe des mots et des silences, sans se rassasier.
Et on accepte volontiers que la nuit soit gagnante sur le jour.

(pix: deviantart.com, gilead)

mardi 23 septembre 2008

UNO


Mon blog tombe en désuétude.
Inutile de le nier, mes pensées, mes mots et mes journées se cassent un peu la gueule sur l'absence d'habitudes dont elles sont ordinairement entourées, sur ce train-train routinier qui leur manque. On se lève chaque matin pour innover dans cette atmosphère flotteusement euhénessienne, parce que personne ne vous prend par la main pour faire marcher sur des lignes proprinettes. Certes il y a des rencontres avec des gens censés vous apporter un peu d'aide. Mais malgré eux ils vous renvoient à votre propre liberté désespérée.
C'est vous qui choisissez.

Êtes-vous sûrs de savoir pour quoi vous êtes faits? Aucun doute, aucune hésitation? Pas la moindre sueur froide au réveil ou dans l'endormissement, quand vous apercevez votre vie comme un tube de dentifrice impossible à reboucher, duquel s'échappent des masses molles et informes que vous ne parvenez pas à rattraper? Toujours une certitude inébranlable et malaisée à manier, toujours ce poids dans le ventre, cette résolution dans la tête quand vous vous dites: "moi, je ferai ça"?

Je me bats avec des séries d'horaires à donner mal au crâne aux bestioles les plus amorphes de la création (carpe, ruminants à sabots fendus... voire, pour les plus tordus, carpes à sabots fendus). Des papiers, des brochures et des emplois du temps voltigent dans les cadres déformés de mon cerveau post-prépa.
Bonne nouvelle, ma motivation a pourtant (un peu) repris du poil de la bête; je sens des plumes acérées et des crayons prêts à s'épanouir sur des pages blanches, je sens de mauvais calembours prêts à péter. Je sens l'adresse mail (très chic) "@ens.fr" chauffer, grappiller ça et là sur la toile Web (où s'engluent nos moindres mouvements et nos moindres choix) des contacts plus charmants les uns que les autres. Je sens les choses prendre peu à peu leur place, et j'aime ça. Au risque de craindre de les déplacer.

Proust m'a fait délirer avec ses histoires de chambres à coucher; mais j'admets reconnaître ma propre conscience dans ce fluide invisible qui vient palper des murs et des meubles encore inconnus pour y créer des habitudes. Je travaille tout simplement à réduire l'espace laissé libre à la colonisation errante de mon esprit désormais plus parisien que jamais: je postérize les surfaces immaculées de mon nouveau chez-moi. Cat envie mon Johnny Depp au-dessus du lit. C'est parce qu'elle n'a pas vu que le cavalier sans tête est plus proche de mon oreiller que le beau ténébreux au sourire imperceptible.

Entre les opérations diverses d'emménagement, de décoration, de ravitaillement, d'organisation, il reste encore un peu de place pour le reste...
C'est-à-dire le reste. Les mecs. Une magnifique déception, aussi belle que drôle. Un coup du sort qui pour une fois me fait pouffer de rire avec le destin. Parce qu'on ne peut pas toujours lui en vouloir. Mais je garde les yeux bien ouverts, rassurez-vous.

L'amitié pétille à chaque coin de rue.

dimanche 14 septembre 2008

Calliope


Rester "muet" devant la feuille blanche, c'est comme bloquer devant la fenêtre texte de blogger, après avoir cliqué avec conviction sur "Nouveau message"; ça fout la trouille, ça énerve et ça rassure. Après tout, la Providence n'a pas chargé la muse Inspiration de venir nous chatouiller la plante des pieds aujourd'hui... ça la regarde, à quoi bon se battre?

J'ai toujours défendu le "Quand on le sent pas, faut pas s'forcer". Proverbe d'une grande justesse, à vrai dire, mais bien mal servi par les êtres humains. On s'en sert trop souvent pour se cacher à soi-même et dissimuler aux yeux inquisiteurs d'autrui qu'on aime céder à la paresse, au découragement ou à la fatalité du médiocre. Qu'il est confortable de savoir que nous n'avons aucune prise sur les événements, même ceux qui nous touchent intimement! Quel bonheur de sentir à chaque respiration cette destinée, cette main divine ou d'un tout autre mysticisme, se glisser entre nos pensées et nos actes comme un bout de carton plié en deux entre le pied d'une table bancale et le sol vierge du lino! C'est une justification permanente à nos coups de blues colorés de mauvaise volonté. On s'y berce, on s'y plaît, on s'y installe.

Alors, oui. Oui c'est vrai certains d'entre nous font mieux, plus beau, plus grand, sublime, lorsqu'ils sont profondément malheureux, shootés, amoureux (ce qui est presque la même chose), heureux, cyniques... Comme beaucoup nous avons le sentiment que le modèle du poète maudit est celui de la plus grande pureté parce qu'il supprime l'interstice du carton séparant la table du parquet ciré, la révélation de son écriture poétique; parce qu'il refuse un tel obstacle et rétablit les lois de la gravité. Pourquoi élire Baudelaire et Rimbaud au rang des grands palpeurs de vérité? Parce qu'ils sont en connection directe et sublimibale avec cet "au-delà" auquel nous voulons croire, même quand nous nous le cachons? Parce que nous croyons qu'ils étaient voyants et que nous sommes aveugles?

Ces exemples nous laissent convaincus; il faut une certaine dose de spontanéité et de débordement interne pour bien écrire. Pour écrire-tout-court, aussi. Si cet ingrédient est absent de la recette complexe de nos états d'âmes quotidiens, nous rangeons le tablier. Le grand cuisinier dévoilera son talent une autre fois. Plus tard.

J'aime ce "plus tard". C'est douillet, certain et précis car irréel (et qu'on façonne le rêve bien plus facilement que la réalité). Hum... c'est la belle tentation d'un néant quotidien d'où naîtrait, comme par enchantement, un destin hors du commun. Comme si l'on pouvait gagner le 100 mètres sans jamais frôler la grille de départ du bout d'un seul orteil.

C'est un beau rêve, mais ce n'est pas assez.
Ce n'est pas vrai.

dimanche 24 août 2008

Dites "ouistiti"


Je ne peux pas m'empêcher de poster cette photo-là. Après presque une journée entière à récupérer à droite à gauche toutes les photos auxquelles a pu donner naissance mon appareil numérique (je n'ose vous dire combien de fois il a été papa), les inévitables souvenirs qui vous serrent un peu la gorge sont venus peupler ma chambre de fantômes souriants. Sur ces carrés de couleur pixelisés, des sourires, des fous rires, encore et encore... A croire parfois qu'on a passé la Terminale et la BL à se marrer (ce qui est faux, nan? Enfin, je crois. Euh...).

Mon projet étant d'implanter des colonies bienheureuses et fertiles de photos sur les murs de ma future chambre, je sélectionne vos plus belles grimaces, vos poses de stars et votre sublime naturel. Ça en fait, des fenêtres ouvertes sur le passé. Un joli diaporama de la vie; incomplet et irrésistible. Un petit goût de bonheur partagé.

Les gens heureux sont toujours photogéniques.

samedi 23 août 2008

Un p'tit tour et me revoilà


Bonjour, mes chers et tendres... Je reviens de loin, par-delà la frontière du Rhin, toub-tidoub!
Pour tout vous dire, la France m'a manqué. Les Français m'ont manqué. Leur vulgarité et leur incivisme m'ont manqué. L'odeur usagée de Paris m'a manqué. Les horizons désespérément plats de ma campagne m'ont manqué. Les gens et leurs éternels découragements m'ont manqué. Tout ce qui fait du bien dans l'ordinaire de la vie, quoi.

N'allez pas en déduire que tout ce que je retiens de ces longues (... longues) vacances, c'est une vague nostalgie à double sens (regret des temps parisiens et des auspices vacanciers). Au contraire! Mais bon, quand on rentre, c'est toujours le bonheur d'être de retour qui prévaut. Et puis, faut admettre que cette petite joie ne dure généralement pas longtemps; alors je la plaque avec fermeté sur l'écran de l'ordinateur avant de la voir disparaître.
La tablette de chocolat dans une main, la souris dans l'autre (mais avec quoi est-ce que je tape???), je suis prête pour la plus belle des aventures: celle du conteur...

Cette année, on peut dire qu'avec mes parents et ma soeur, on a misé gros: quatre pays d'un coup (oui, parce que si je vous dis cinq en incluant le Lichtenstein, qu'on a traversé à toute berzingue, vous allez dire que ça ne compte pas... pfff p'tits banquiers en puissance!). Et puis le pari a rapporté. C'était superbe.

Première étape: la Bavière. Des lacs d'un bleu méditerranéen sous le soleil, la ville de Lindau à l'allure méridionnale; de quoi vous faire saliver, au tout début des vacances. Et, comme d'habitude quand on franchit les frontières de notre bel hexagone, ce qui change, imperceptiblement... Une atmosphère, une ambiance; les mots étouffés des conversations (en allemand), le comportement des gens aux passages piétons. Les menus, qu'on ne lit plus, mais qu'on déchiffre avec moult suppositions fantastiquement drôles. Oui, même quand on a fait de l'allemand et qu'on n'a (par miracle?) pas tout oublié, les subtilités culinaires locales échappent souvent à nos attirails linguistiques réglés en mode "BL".

Puis Munich. On commence par le show room BMW; peut-être pas le plus typique de l'endroit, mais qui sait? Mon père a justement grommelé, sur le trajet retour d'une longueur sans faille, avec le crachouillis du moteur en arrière-fond: "Faudra quand même m'expliquer comment ça s'fait qu'en Allemagne et en Autriche on trouve autant d'Audi et de BM, et qu'en France on voit que des...". La phrase interrompue se complète aisément. Et s'il vous fallait des indices, vous n'auriez qu'à vous dire qu'en tournant la tête, vous auriez vu par la vitre arrière une vieille camionette blanche, de celles qui polluent l'A4 le samedi matin, ou une Peugeot d'occas' avec un A plaqué sur le cul. Bref... Je disais donc "Munich", ou plutôt "München". Que dire de cette ville? Déroutante au premier abord, surtout le quartier turc, où se trouvait notre hôtel. Quoique je n'ai rien contre les brouettes de pastèques qui se baladent au milieu de la chaussée...


Show Room BMW


Mais il y avait aussi le quartier universitaire, les musées (Alte Pinakotheke & Pinakotheke der Moderne si par hasard ça évoque quelque chose à quelqu'un). Là j'ai vu combien m'ont apporté les visites avec Monjou (et une plus attendrie que moi dirait: "ce cher Papy..."). Par la suite, j'ai trouvé Munich plus sympathique, comme s'il fallait du temps avant de découvrir son vrai visage. Le centre et la place du Rathaus sont encombrés perpétuellement par les touristes, mais bon... Il y a d'autres quartiers sympas et de quoi satisfaire deux de mes besoins fondamentaux: de bons restaurants et des dizaines de magasins de chaussures!



Schloss Nymphenburg


Je n'ai pas l'intention de détailler la totalité de mon voyage, sinon on y passerait des heures (enfin, j'y passerais des heures, et vous vous ne liriez pas plus loin que la vingtième ligne...). Ce que je peux dire, c'est qu'en Allemagne on a vu un sacré paquet de "-see" (autrement dit des lacs pour les non-germanistes). Herrenchiemsee (le Versailles allemand, construit par Louis II de Bavière en honneur de Louis XIV, lequel Louis II de Bavière n'avait pas moins de trois châteaux pour son usage personnel... Et puisque je les ai vus tous les trois, entre cette année et l'année dernière, je peux vous dire que Monsieur faisait des folies! Enfin, on est mégalo ou on ne l'est pas...), Hintersee, Königsee et Berchtesgaden... En Autriche, le Zellersee.



Herrenchiemsee


Et puis, splendide, les Alpes autrichiennes et italiennes avec leurs glaciers. Alors, effectivement, il faut avouer que les températures étaient peu estivales; de 10 à 15° en hauteur... On a investi dans une polaire, que voulez-vous? En Italie, on s'est baladé dans les Dolomites, et c'était merveilleux. Rien à voir avec l'idée que je me faisais des Alpes. Les sommets avaient les allures découpées des parcs nationaux américains et les vallées se prenaient pour des canyons. On a marché autour des Trois Cimes, le lieu emblématique des Dolomites (là où, paraît-il, Tolkien a trouvé l'inspiration pour son Seigneur des Anneaux - paix à son âme), et le spectacle était grandiose. Nous étions minuscules, perdus au milieu de blocs de pierre râpées par les millénaires et les intempéries, qui se dressaient, indifférents (perdus aussi au milieu des bavardages italiens de toute la marmaille qui empruntait le chemin (ledit chemin ressemblait plus à une autoroute piétonne qu'à un sentier de haute montagne), mais ça c'est encore autre chose). J'avais l'impression de suivre la Communauté de l'Anneau à travers les contreforts des Monts Brumeux et d'apercevoir les neiges du Caradhras au loin. Et effectivement, il a neigé pendant notre séjour en Italie (mais seulement à très haute altitude). Les montagnes ont été saupoudré et la température a chuté. Logique.


Le Glacier du Pasterze



Les Dolomites


Une petite ville à visiter sur notre parcours passablement sinueux (je ne pourrai jamais conduire sur les routes qui traversent les Dolomites... j'ignore si vous les avez déjà empruntées, mais - pardonnez l'expression - je serrais les fesses, et je n'étais pas la seule dans ce cas dans la voiture. On a du bien faire quelques centaines de virages abrupts et étroits...): Bolzano. Et puis retour dans les montagnes, à très haute altitude: Hochsölden, 2 200 mètres, avec la terrasse de l'hôtel qui a vue sur les montagnes, les pâturages et les remonte-pente. Splendide.

Enfin la Suisse. Un petit village nommé Wengen, que nous connaissons bien, mais sous un autre visage, pour y avoir été deux années de suite faire du ski. Et ça a fait plaisir de revenir dans des lieux familiers! Alors encore une fois des ballades, des ballades, et des ballades... Je n'ai jamais fait autant de sport depuis au moins deux ans. On peut dire qu'on a rentabilisé les pompes de marche!

Voilà, un p'tit tour d'un p'tit coin du monde. Après plus de sept heures de bagnole, retour dans mes Pénates. Le téléphone portable est là, qui me fait de l'oeil. La boîte mail a été désengorgée de toutes les pubs et les requests facebook, le courrier ouvert et lu avec application, le reste de la soirée et la journée de demain sont à mon entière disposition...
Vaquons donc, mes chers, vaquons.

samedi 2 août 2008

Hold on, we are trying to connect you


Petit message de mise en attente... Demain je quitte les zones bienheureuses d'accès à Internet pour voler vers de nouvelles contrées, retrouver la beauté de la langue allemande, les Knödel et les Bratwurst. Non, il serait dommage de partir sur de tel préjugés ;).

Contentons-nous de préciser que ce blog passera bientôt en cuve cryogénique, que ses petites cellules de texte pionceront bien tranquillement lorsque vous cliquerez avec espoir (ou par hasard?) pour lire un p'tit quelque chose de neuf.

D'avance, nous nous excusons pour la gêne occassionée.
Nous vous remercions d'avoir choisi Lineyl Airlines et espérons vous revoir prochainement sur nos lignes.

mardi 29 juillet 2008

Au pays des schtroumpfs, le ciel est bleu (ailleurs aussi...)


On me reproche de faire la grève du blog, et on a le culot de le faire sur mon propre blog! ... :)

Les vacances, l'absence de stress, le soleil et le farniente... Il faut me comprendre, comment voulez-vous que je trouve l'inspiration? Le temps passe, vite et lentement. Au final, je ne peux pas vraiment résumer ce que je fais de mes journées, c'est informe et ça coule comme une pâte de dentifrice. C'est du temps agréablement laissé à lui-même. Je vois le soleil monter dans le ciel, cuire les terrasses et les chambres en début d'après-midi, et redescendre. (Et oui, Alex, c'est l'histoire de la vie...).

Mes vacances en mode "shuffle" m'ont conduit successivement: à notre séjour sur la Côte Béhèle; à une semaine de rangement de chambre made in St Thibault, avec incursions possibles du genre "On a marché dans Paris"; à un mariage, celui de ma cousine, superbe (le mariage et la cousine!); à la Gare de l'Est, direction Turckheim, l'Alsace et les géraniums. Facebook est devenu mon compagnon de voyage. Faute avouée est à moitié pardonnée. Je fais des projets, encore et encore; mais qui plus est, je me bouge même pour essayer de les réaliser. Bienvenue dans la vie réelle...

Et puis je continue à écrire. Des histoires. Des personnages. Des lieux. Et plus je creuse, plus je m'enfonce. Ma tête, qui n'a plus à mouliner des dates et des dates, des chiffres et des théorèmes, se rabat sur le contenu imaginaire de tous ces livres qui attendent de naître. J'essaie d'être réaliste, et je sais que le mot de la "Fin", n'est pas pour aujourd'hui. Au moins je ne cesse d'être surprise. Pour l'instant je me concentre sur la suite de "Evrasth" (désolé pour ceux qui attendent à Esthröne en compagnie de l'infortuné Mabro!). Une chose à la fois, sinon je finis par m'embrouiller. Je me réserve aussi le droit de construire grossièrement mon "Nevedius". Mais là c'est carrément la taille au dessus, pourrait-on dire. Le genre de truc qu'il va me falloir des années avant de terminer. J'ai l'impression d'être un canard qui pond des oeufs d'autruche.

Et puis, aussi, je redécouvre le plaisir de lire ce que je veux, de noter ce que je veux... Quelques phrases, pour laisser Hugo parler, bien mieux que moi:

* "C'est de la physionomie des années que se compose la figure des siècles"

* "Nous avons beau tailler de notre mieux le bloc mystérieux dont notre vie est faite, la veine noire de la destinée y reparaît toujours"

* "Étudier à Paris, c'est naître à Paris" (et qui pourrait contredire ça?)

* "Voyager, c'est naître et mourir à chaque instant"

(Les Misérables)

vendredi 18 juillet 2008

Be happy


"C'est son côté agaçant, il faut qu'il parle"...

Après une semaine aussi inoubliable, la seule chose à faire serait de se taire. Parce que tout ce qu'on pourrait dire serait faux, d'une certaine manière, serait inapproprié. Pourtant je rayonne encore sous le soleil, auprès d'une piscine bleue, les pieds gigotant dans l'herbe. Je regarde encore autour de moi, cherchant où se cache ce joli mot: le bonheur. Comme pour découvrir une explication à ce qui reste mystérieux.

Des gens? Non... pas "des gens", mais "ces gens": ces gens, qu'on connaît trop, sans se lasser de les écouter. Ces blagues qui nous font rire, quand bien même on les a entendues un nombre incalculable de fois. Ces sourires qu'on lâche sans rien calculer, ces regards qui, tous ensemble, s'attardent sur des épisodes communs, tristes ou drôles.

J'ai rarement réussi à me retrouver, sans me réfugier dans la solitude. Mais ce qui est fou: c'est au milieu de vous tous que je suis moi, que je me sens bien. C'est parmi les autres que je tiens à nouveau en moi. On croit que tout ça forme un grand bordel où caractères, goûts et couleurs s'entrechoquent parfois au hasard. Moi j'aime à y voir une cohérence bizarre mais indéniable. Tout simplement, ça marche.

De retour dans notre belle région parisienne, la grisaille dehors imbibe les feuilles. Comme ailleurs, c'est vrai; mais déjà c'est différent. J'ai retrouvé comme un élan pour avancer, et des idéaux en masse. Un optimisme rageur qui risque de se heurter bientôt à une sorte de banalité quotidienne. Et bien, tant pis.

J'envoie de l'amitié par-delà mon clavier. Comme si je débordais.

Je vous souhaite de bonnes vacances.
Commencées sous ces augures, peuvent-elles ne pas l'être?

vendredi 27 juin 2008

Des pâtes, des pâtes, oui mais des ***


C'est fou comme tout peut basculer vite.

On commence la journée tranquillement. Le beau temps, les oiseaux qui gazouillent, tous nos petits clichés sur ce à quoi doit ressembler le bonheur. On se sent léger, heureux, on sourit. Un peu plus et on ferait une pub pour le nouveau dentifrice (vous savez, celui qui brosse plus blanc que blanc).

On range sa chambre pour mettre en même temps de l'ordre dans sa petite tête. Faire briller. Tout ça prend forme, cohérence (c'est une qualité dont je raffole...). Et puis cette grande maison finit par sembler un peu vide. Heureusement, on sait que les gens vont revenir.

Et ils reviennent. Avec leur mauvaise humeur, leur répartie cinglante quand elles ne veulent pas l'être. Avec leur altérité si manifeste! Je crois que je m'énerve pour rien. Quand je pense que ça fait une semaine que... bref, que nous savons. Une semaine que j'ai eu le temps de former tout plein d'adorables idéaux romanesques et romantiques. Une semaine que j'ai eu le temps de reconstitué mon tissu d'inaction, mes globules somnolants, mes muscles-détente atrophiés. Jusqu'à plus soif.

Le temps passe vite, quand on fait peu de choses. Je ne me plains pas. Je m'interroge. Je lis par-ci par-là quelques petites choses. J'ai du mal à rester accrochée sur un bouquin. Que la BL m'ait fait perdre le plaisir de lire, ce serait vraiment un comble (et quand on y réfléchit bien, ce ne serait peut être pas si étonnant...).

L'appétit vient en mangeant... J'appliquerai donc les remèdes de grand-mère. Autres nouveautés du jour? Des résultats, encore (mais pas pour moi). Des gens qui vous appellent, vous informent que vous ne vous êtes pas présentés pour passer les oraux de ***, etc... Des gens qui n'ont aucune idée de qui vous êtes, qui s'en foutent et qui ont raison. Simplement des gens qui doivent cocher une petite case, dans un petit formulaire. Ne rien laisser dépasser. Merveilleuse administration (pour les fans, écouter le sketch de Coluche).

Ça me fait penser... Je suis tombée sur l'émission "C dans l'air", sur France 5, il y a quelques instants. J'ai eu l'inoubliable plaisir de voir enfin la tête de Bruno Palier, et de voir confrontés un économiste, un sociologue, un ??? (don't remember) et un politicien. Devinez lequel m'a fait le plus rire?... (on verra si vous êtes assez engagés pour laisser des commentaires futiles apportant réponse à cette question).


Sur ce, j'ai une soirée.
Encore une. Cette fois, pas d'uniforme ni de beaux Polytechniciens: duvet, camping, piscine improvisée.

Et des pâtes, pour changer.

mercredi 25 juin 2008

"L'amour sent confusément que son seul dérivatif réel est le travail" (Radiguet, Le diable au corps)


Que d'heures ont passé depuis hier soir. Elles ont fui vite, parfois. Maintenant elles me semblent avoir été si longues...
J'ai brassé ma déprime incompréhensible (enfin, partiellement incompréhensible), pleuré sans savoir pourquoi, tout en sachant pourquoi. Tout en sachant que mes raisons n'en étaient pas. Ma chambre, mon bureau encore dérangé. Salon, identique. Les fauteuils de cuir ont imprimé leur silhouette dans ce paysage intérieur. J'ai même regardé "Un jour une histoire" (que ceux qui me jettent la pierre s'avisent qu'ils témoignent par cette indignation qu'ils connaissent ladite émission... et que les autres ne se croient pas tenus d'y goûter!). Puis l'organisation de la soirée, la facilité avec laquelle il suffirait d'envoyer un SMS, d'annuler. L'informatisation totale, l'absence de contact, la dépersonnalisation du texto. Parfaitement ce qu'il me fallait. Dans le doute, abstiens-toi, a-t-on coutume de dire. J'ai tiré à pile ou face. Pile a gagné; direction Paris.


RER, métro. Des gens que je ne supporte plus, sans les avoir jamais vu. Des visages qui me semblent grossiers, vulgaires, impurs. Des sourires mal placés qui font de mes regards des éclairs de mépris. La musique dans l'oreillette, les larmes au coin des yeux.

Quels remèdes contre la déception? McDo et Docteur House. Fainéantise entièrement assumée, quand d'ailleurs on n'assume plus grand chose. La nuit approche, le maquillage rend les paupières luisantes, et les pieds se cambrent. Les hanches ondulent dans les vagues de musique surgies de l'entrée de la boîte. On rentre.

L'endroit est sympa, deuxième fois que je visite. Incroyable comme le temps semble s'arrêter, en même temps que tout mon corps me fait sentir la durée de chaque seconde. Fatigue, mal aux jambes, ô mes joies des soirées dansantes! J'avais dit que je ne le ferais plus, que ça faisait trop mal... Non je ne parle pas de jambes lourdes, mais de ma tendance à scanner automatiquement tout ce qui me passe sous les yeux. J'ai décidé qu'il fallait opter pour le repli, la protection. L'indifférence, mais c'est ça qui est encore plus douloureux. Alors on succombe.

Ou pas, vu qu'il n'y avait pas tellement de beaux mecs. La musique, les basses, les stroboscopes, tout ça fait bouillonner le sang, accentue les déhanchés. Plus qu'une seule chose à faire: fermer les yeux. Tout s'éloigne, et c'est tant mieux.

Sortie. Paris by night, les Noctambus et leurs habitants. Morphée nous rejoint bientôt. Je suis sûre qu'il nous prend dans ses bras, mais qu'il s'endort avec nous. J'ai pitié des âmes fatiguées.

Aujourd'hui, amélioration de mon moral intérieur: ou comment vaincre la fébrilité en faisant chauffer la carte bleue (et si possible pas la sienne). SOLDES. L'impression de se reconquérir soi-même à chaque nouveau Tee-shirt acheté. Recouvrir tout cette perte de confiance d'une couche 100% coton. Se reconstruire, soi, son style, ses envies, ses idéaux. Comme quoi la mode ça n'est pas si superficiel.

Et on revient.

Et on échoue immanquablement devant cet écran d'ordinateur. A se demander pourquoi on écrit. Et à comprendre qu'aucun motif n'est requis.

Qu'on en a juste besoin.

jeudi 29 mai 2008

***


Parfois j'ai juste envie d'envoyer chier le monde
Et cette vie que je porte
Parfois j'ai juste besoin d'ouvrir cette putain d'bonde
Et de claquer la porte

samedi 24 mai 2008

Et il arrive que ça se passe bien...


Vous voilà, tout moite et tremblotant. Vous atterrissez vous ne savez comment devant la porte indifférente d'une salle, dont le rouge vous évoque irrésistiblement l'entrée des Enfers où ronfle Hadès. Derrière cet amalgame de bois et de plastique vous attend l'horreur et le stress à leur plus haut degré de raffinement.

Vous allez passer une khôlle.

Vous n'avez jamais été aussi crispé sur le bracelet plastifié de votre montre, derrière bouée de sauvetage qui vous raccroche un peu à la réalité. Qui vous rappelle que vous allez simplement parler, pendant quelques minutes. Puis que tout sera fini. Finalement cette montre qui vous angoisse ne vous veut pas de mal. Elle devrait avoir la vertu apaisante des propos rationnels qu'on entend à longueur de journée; quoi de plus inévitable que le passage du temps, quoi de plus insignifiant, dans le cours inlassable de la vie, qu'une demi-heure à s'exprimer devant quelqu'un qui ne vous doit rien, à qui vous ne devez rien?

Mais voilà, cette relation lyophilisée, cette interaction impersonnelle et désinfectée, vous n'arrivez pas à vous l'enfoncer dans le crâne, et encore moins à l'incarner. Vous êtes là, vous êtes présent. Votre corps, vos mains, vos joues, vos yeux, votre voix... Pas moyen de se réfugier derrière l'anonymat de la plume. Ni même de faire comme si l'on s'adressait à un miroir.

Si encore l'autre avait la délicatesse de s'abstenir de tout signe de vie. Mais non. Ce que vous voyez dans ses yeux, dans ses mains qui s'agitent auprès de gribouillis hiéroglyphiques, c'est une distance froide et impitoyable. Parfois, c'est le découragement, ou l'incompréhension. Souvent, c'est le jugement. Vous avez l'impression que c'est cette phrase qui n'arrive pas à se terminer, ce mot qui n'est pas à sa place, cette transition qui se barre en couille, cette fausse rhétorique cousue de fils blancs, qu'on juge en vous.

Vous vous sentez exposé. Vous l'êtes. Et vous ne l'êtes pas seulement durant cette demi-heure interminable et trop courte. C'est tout votre corps qui se cabre, plusieurs heures avant le ding-dong fatidique de votre horloge de stress interne. Et vous ne comprenez plus comment vous pouvez avoir aussi peu de contrôle sur vous-même. Merde, après tout ce ventre il est à vous! Aucune raison qu'il ne se range pas aux exhortations parfaitement justifiées de votre conscience.

Vous avez l'impression de nager dans une piscine où les carrés de plastique des lignes d'eau se sont barrés. L'impression que quelqu'un a mélangé les drapeaux du slalom, sur la piste de ski. Alors qu'il importe avant tout que votre prestation soit claire et logique, vous avez le sentiment d'avoir malmené la mayonnaise en agitant la cuillère dans tous les sens, et qu'elle ne prendra pas.

Well, sometimes it happens . Et parfois non; dans ces moments-là, vous éprouvez la joie indicible d'avoir vaincu votre plus grand ennemi, c'est-à-dire vous-même.

Oui, il arrive même que ça se passe bien...