mardi 4 mars 2008

Divagations


Je ne sais plus ce que tu as dis, j’ai trop usé tes phrases, mes souvenirs, pour qu’encore la vie y prenne.

J’ai aimé ces images imparfaites comme le vent aime l’herbe et la rend uniforme et lisse à force de l’embrasser. J’ai tant rêvé, qu’il a fallu que ma vie soit un conte de fées, que tout soleil levant soit un clairon d’argent, pur et bref, dans l’air sombre des jours d’automne… j’ai peint les feuilles tombées à terre pour qu’elles restent frêles et timides ; j’ai refait des vies à milliers comme on tricote sans fin des mailles…
Aurait-on pu vivre derrière notre décor de théâtre ? C’est le repos des sages qui mettent à terre leurs yeux, comme des billes, et les laissent errer, perdus, quand ils touchent au vrai qui suinte de nos silhouettes.

Ô tendre vie, tu m’es offerte et je t’oublie.
C’est la caresse des jours qui passent qui me reste de toi, c’est nos fusions d’un temps, nos pressions mutuelles dont ta peau est marbrée. C’est ton corps ployé comme un chêne centenaire à l’ombre duquel j’abrite des larmes que tu ne sens pas.
Si tu sentais, partirais-tu ?
Je suis le passager clandestin, l’œillet à ton veston, la musique dans tête. Je suis sans exister. J’ai niché mes espoirs dans la courbe de tes mots. Tourne notre monde où les phrases deviennent grandes et muettes comme les neiges éternelles.

Sans un frisson tu es passé. Tu es resté.

Le ciel est bleu, trop pâle pour aller bien. Il a beau avoir le cœur bien accroché, ses lèvres, parfois trop serrées pour un baiser que l’on dédaigne, sont blanches aussi. Couronné de soleil, il domine, mais c’est un amant éconduit sur terre. Saura-t-il les prières tranquilles et mouillées de larmes sereines ?
C’est un cri, c’est un chant, c’est une célébration. C’est la joie et l’espoir qui hurlent par la bouche ouverte du monde. A-t-on pu si longtemps y être sourd ?
Sous deux mains qui se frôlent passe l’éternité, sous les doigts qui s’embrassent murmure un souffle. Sous la peau du quotidien, un mot répété, de cœur en cœur, de vie en vie.

Aime moi, même si c’est vain.

La vague passe où je divague. Qui sommes-nous dans son ombre ?
Le cosmos se tait, frivole, capricieux. La voie lactée sourit à nos exigences de sens ; elle nous berce du bruit des planètes comme on prend dans ses bras un enfant qui demande : « pourquoi ? ».

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